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Technique de fabrication des épées médiévales
Jusqu'à la fin du XVIIIème siècle, on a ignoré le rôle du carbone dans le fer. C'est par empirisme que les forgerons ont découvert la différence entre le fer et l'acier, et leur obtention à volonté.
Obtention de l'acier au Moyen-Age
peinture forge épée médiévale
Les forgerons du Moyen-âge avaient derrière eux plus de mille ans de savoir-faire; ils pouvaient produire à volonté du fer et de l'acier.
Tout travail de forge nécessite des chauffes successives du fer au sein du foyer. Durant ces opérations (dans des températures entre 900°C et 1200°C), il y a diffusion du carbone du charbon dans le fer. Cette diffusion est maximum aux environs de 900°C et la pénétration du carbone est de l'ordre de 0,1 à 0,2mm par heure de chauffe. Ce fer est donc aciéré en surface, c'est ce qu'on appelle la cémentation, propriété connue et utilisée déjà par les Celtes.
Pour faire la différence entre les deux produits les forgerons les mettaient dans un milieu corrosif comme le fumier, le fer était moins attaqué que l'acier.
Les métaux ferreux changent de couleur lorsqu'on les chauffe ; ces couleurs correspondent à des températures et les forgerons pouvaient ainsi contrôler ces dernières. C'est d'elles et de leur bonne maîtrise que dépendent tous les traitements sidérurgiques.
La trempe
La trempe d'un acier a pour but d'augmenter sa dureté. Cependant, plus la teneur en carbone est grande, moins l'acier est ductible (apte à être façonné par déformation). Aux alentours de 2,3% de carbone, le forgeage n'est plus possible, le métal devient trop cassant. De plus, la résilience d'un acier trempé (sa résistance au choc) diminue avec l'augmentation du taux de carbone de même que son aptitude à être soudé. Par contre, la dureté augmente avec l'augmentation du taux de carbone.
Les aciers sont formés de microcristaux qui apparaissent au cours du refroidissement du métal et ne sont visibles qu'au microscope. Au cours de la chauffe d'un acier, son organisation cristalline change. A chaque température correspond une structure bien précise dans l'alliage fer-carbone.
La trempe dans un bain plus ou moins froid a pour but de conserver une structure cristalline désirée qui confère à l'alliage une dureté voulue. La composition du bain, sa température, joue un grand rôle au niveau des propriétés mécaniques du produit fini.
Après avoir chauffé l'acier aux environs de 800°C, il est refroidi brusquement dans un bain. Cette opération va transformer le carbone de l'acier en grains presque aussi purs que le diamant. Le choc thermique que subit la pièce d'acier entraîne des contraintes internes telles que cette dernière devient très fragile, tout en étant très dur. Pour éliminer une partie de ces contraintes il est nécessaire de faire subir à la pièce un second traitement : le revenu.
Le revenu
Il consiste à réchauffer la pièce pendant un laps de temps plus ou moins long, en fonction du produit à obtenir, à une température inférieure à celle de la trempe pour ne pas éliminer ses effets. La trempe étant réversible, il ne faudrait pas l'annuler.

La température de cette chauffe dépend elle aussi des propriétés mécaniques que l'on veut pour le produit fini. Cette chauffe élimine une partie des contraintes dues au choc thermique de la trempe et rend la pièce plus résiliente.
Naissance des aciers corroyés
L'épée médiévale est un outil qui doit être très dur tout en restant le moins cassant possible. Sa fabrication requiere donc un compromis entre la dureté et la résilience, sans négliger une nécessaire élasticité.
structure interne épée médiévale
Au Ier siècle avant Jésus Christ, les Celtes d'Europe centrale (Allemagne du sud, Lorraine, Suisse) fabriquaient des lames composites de fer et d'acier. Ils connaissaient la trempe et la cémentation.

Pour résoudre le problème dureté-résilience, les Celtes ont donc allié le fer à l'acier. Cette région resta réputée pendant tout le Moyen-Age et même au delà pour sa production de lames. La Norvège viking appréciait ces épées bien que l'exportation d'armes ait été interdite par les Carolingiens. Le monde musulman importait aussi des lames de ce type entre le IXème siècle et le XIIème siècle.
Les épées germaniques
Jusqu'au XIIème siècle, les lames des épées étaient fabriquées de la même manière, en damas corroyé torsadé. Avec le temps et l'expérience, les forgerons avaient compris que plus les couches de fer et d'acier étaient nombreuses, plus le corroyé était résistant. Les macrocristaux des métaux ferreux sont rangés en fibres. Les pliages successifs lors de la fabrication d'un lopin entraînent l'allongement de ces fibres ce qui confèrent de l'élasticité. Cependant il ne faut pas dépasser vingt pliages.
L’âme des épées germaniques était formée de deux lopins de damas corroyé torsadé, l'un dans un sens, le second dans l'autre. Assemblés bord à bord ils étaient ensuite entourés par un tranchant d'acier. Le tout était soudé à la forge. Généralement, ces épées sont longues d'environ 80 cm et pèsent moins de deux kilogrammes.
La construction des lopins
En premier lieu, une barre d'acier est soudée entre deux barres de fer en chaude portée. L'assemblage réalisé, ces trois pièces n'en forment plus qu'une. Celle-ci est allongée puis pliée en deux et soudée sur elle-même. L'opération se répète alors plusieurs fois jusqu'à obtenir le nombre de feuilles désiré.
La soudure en chaude portée
L'opération consiste à chauffer les pièces jusqu'à ce qu'elles soient à l'état pâteux, au blanc soudant, avec une température aux environs de 1300°C. Ensuite, il faut les marteler à coups de marteau, mesurés d'abord puis de plus en plus puissants, au fur et à mesure que le métal se refroidit.
Chaque soudure entraîne une perte de métal, brûlé dans la forge. Ainsi pour fabriquer une épée germanique, le travail est considérable ; il faut au départ environ dix kilogrammes de matière pour produire 2 kg de produit fini. La fabrication d'une telle arme demande beaucoup de matière, de temps et l'emploi d'un ou même de plusieurs ouvriers très spécialisés. Il est donc aisé de comprendre pourquoi, pendant le Haut Moyen-Age, une épée médiévale pouvait valoir jusqu'à sept bœufs.
Les épées du XIIème siècle
C'est très vraisemblablement pour des raisons essentiellement économiques que la fabrication des épées en damas corroyé torsadé va être abandonnée.
En effet, la population ayant augmenté, le nombre de guerriers est allé aussi grandissant. La demande en épées suivit le mouvement. La fabrication de cette dernière devait être toujours plus rapide tout en réduisant au minimum la perte de qualité. La réponse à ce type d'impératifs à obligatoirement donné une lame dont la structure resta non homogène mais de conception plus simple, ce qui donna naissance à un produit moins durable.
Cependant, l'épée médiévale demeura une arme destinée à tailler, sa forme ne se modifiant pas au niveau de la lame jusqu'à la fin du XIIIème siècle qui vit naître l'épée d'estoc.
L'épée d'estoc
L'épée d'estoc est en général plus courte que l'épée utilisée auparavant. Cependant, bien que sa section soit losangée et sa forme générale triangulaire avec une pointe très marquée, le système de montage de la lame reste le même.
Les plates devinrent de plus en plus courantes et furent à l'origine de la modification de la forme de la lame de l'épée chevaleresque qui devient une « roide épée » destinée à piquer.
sources : Histoire Médiévale n°1H avril/mai 2000